Deux pépites pleines de vie

De Eva Wissenz, 8. décembre 2015

 

J’ai beaucoup de joie. Je n’y peux rien, c’est ainsi et cela ne semble pas s’arranger avec le temps. Une joie globale, une joie d’être, un émerveillement certes pas entièrement intact mais bien présent et puis des bonheurs personnels. L’un d’eux est d’être la passeuse de deux textes très fort.

Et donc deux bonheurs récents. Dans Le Conte du Vent, Marie-Noëlle Anderson a réussi un truc très impressionnant. On le sait (enfin, j’espère), les semences sont à l’origine de la vie et de notre alimentation. Or, elles sont fragiles et très menacées par les semences modifiées. C’est un drame terrifiant représentant un marché et des enjeux colossaux. Mais ici la trame est simple : au Mexique, une adorable grand-mère va transmettre ses précieuses semences de maïs bleu à Silvio, un jeune écologiste espagnol. Pendant son voyage, Silvio lit le livre de son frère, un conte merveilleux qui met en scène tous les règnes du vivant et raconte pourquoi et comment le vent de folie s’est emparé des humains. La magie de la vie s’invite dans le récit, l’élève, nous élève, et le livre tout entier redonne foi et courage.

Avec Terra Incognita, nous passons dans le monde des idées, du hors-temps et du tout-possible. Cinq enfants-sages sont embarqués dans une partie de Jeu de l’Oie étonnante et explorent les futurs potentiels que notre humanité pourrait connaître. Comment faire pour créer le meilleur scénario ? Une mythologie de la paix est-elle possible ? A ses questions complexes l’auteur apporte une réponse plurielle riche de sa connaissance des mythes et des sagesses traditionnelles. Là encore, c’est à l’action que nous sommes invités.

Éditer, c’est presque rien et comparer à ce que c’est que créer ce n’est même rien du tout. C’est proposer et diffuser de son mieux, aider à la pollinisation. Mon propre chemin avec l’écriture s’est décidé il y a une dizaine d’années face au désert intellectuel et littéraire français au sujet des problématiques environnementales. La quasi-totalité de la littérature contemporaine me semblait vaine pour nous apporter des ressources nous permettant d’aborder d’une manière ou d’une autre ce qui se tient devant nous, ce qui est là maintenant à savoir une série de problèmes aussi complexes qu’urgent : justice sociale, misère, changement climatique, migrations, corruption, prédation énergétique, hyper-consumérisme, etc. Comment en parler ? Comment parler des solutions qui existent ? Comment en parler dans des fictions ? Nous faire rêver ? Imaginer des enjeux différents et des réponses différentes ? Y répondre, c’est toute la tentative des éditions Seepia.